Chez les personnes qui vivent avec le VIH, à l’ère du traitement antirétroviral (TAR), on a observé une baisse significative du nombre de décès lié au sida, mais une augmentation des décès liés à la maladie hépatique. Une des affections du foie les plus prévalentes chez les personnes vivant avec le VIH est la stéatose hépatique non alcoolique (SHNA), une maladie caractérisée par une accumulation de graisse dans les cellules du foie, qui est à l’origine d’un phénomène inflammatoire causant des lésions.
La vitamine E est un traitement recommandé pour la SHNA chez les personnes indemmes du VIH, mais son innocuité et son efficacité chez les personnes vivant avec le VIH restent à confirmer. Dans le cadre de l’étude pilote CTNPT 024, une équipe d’investigateurs de l’Université McGill, dirigée par la Dre Giada Sebastiani, a traité 27 participants admissibles au moyen de vitamine E orale quotidiennement pendant 24 semaines pour en apprendre plus sur cette option thérapeutique.
« Les personnes vivant avec le VIH sont plus à risque à l’égard de la SHNA en raison de problèmes métaboliques très courants, en cause dans la pathogenèse de la maladie (diabète, dyslipidémie, hypertension) et de facteurs de risque particuliers, soit l’inflammation chronique causée par le VIH lui-même et la nécessité de prendre le TAR toute leur vie », explique la Dre Sebastiani.
Dans cette population, la SHNA est associée à des taux plus élevé de fibrose hépatique (formation de tissu fibreux) et de cirrhose (stade avancé de fibrose) que chez les personnes indemmes de VIH. La cirrhose est une maladie grave qui nuit au bon fonctionnement du foie et peut se révéler irréversible, voire fatale. C’est pourquoi il est important que les personnes vivant avec le VIH et la SHNA aient accès à des traitements efficaces pour empêcher la maladie de progresser jusqu’à ce stade.
« Les personnes vivant avec le VIH sont actuellement exclues des essais cliniques mondiaux sur les nouveaux traitements antifibrotiques pour la SHNA, et la présente étude est l’une des rares à se pencher spécifiquement sur une intervention à leur intention », résume la Dre Sebastiani. « La vitamine E pourrait servir de traitement intermédiaire sûr et efficace pour améliorer la fonction hépatique. »
Pour mesurer l’impact du traitement par vitamine E, les investigateurs ont vérifié les taux de trois biomarqueurs : alanine aminotransférase (ALT), paramètre d’évaluation contrôlée (désigné par l’acronyme anglais CAP) et biomarqueur sérique cytokératine 18 (CK-18). On sait que le TAR fait augmenter l’ALT, ce qui est associé à la fibrose hépatique, à la SHNA et à la mortalité. Le CAP et la CK-18 sont des signes de présence de gras dans les cellules du foie et de mort cellulaire, et leurs taux augmentent ensuite en présence de SHNA.
Au cours de cette étude, le traitement a permis de réduire significativement l’ALT après un mois seulement, un déclin qui s’est maintenu tout au long de l’étude. En outre, le CAP et la CK-18 se sont améliorés au cours de l’étude — 22 pour cent des participants ont présenté une baisse des graisses accumulées.
Dans l’ensemble, l’étude CTNPT 024 a montré que la vitamine E était efficace et bien tolérée. Étant donné que les personnes vivant avec le VIH sont actuellement exclues des essais sur les antifibrotiques pour la SHNA, les résultats laissent entendre que la vitamine E pourrait représenter une option thérapeutique viable pour les personnes vivant avec le VIH et la SHNA.
Et pour la suite?
La Dre Sebastiani est d’avis que « la vitamine E gagnerait à être étudiée dans le cadre d’essais plus volumineux et de plus longue durée dotés de protocoles randomisés et contrôlés, incluant comme paramètres les taux de gras contenu dans le foie mesurés par IRM ou examen histologique. »
Cette recherche a été publiée dans la revue AIDS.