Voici notre tout premier article en langue française écrit par un des membres de notre Comité consultatif auprès de la communauté (CCC), et nous espérons que ce sera le début d’une longue série.
Guy-Henri Godin a 56 ans et il est maintenant le membre le plus ancien du Comité consultatif auprès de la communauté des personnes séropositifs, ou PVVIH (Personnes vivant avec le VIH), ceux qui étudient et commentent sur les projets de recherches médicaux (protocoles et budgets y compris, mais surtout les formulaires de consentement que lissent les participants prospectifs des études du Réseau). Avec le reste du CCC, Guy-Henri s’assure que les traductions sont valables et fidèles et que les projets de recherche respectent les besoins et priorités des PVVIH.
Guy-Henri représente depuis novembre 2013 la Société Canadienne de l’hémophilie (SCH) i.e. les gens ayant des problèmes de coagulation sanguine, et qui, il y a plus de 30 ans, ont reçus du sang contaminé et ont séroconvertis – non seulement pour le VIH mais aussi souvent au virus de l’hépatite C (VHC).
Voici que ce qu’il a dire à propos de son poste :
Moi, j’adore le hockey. J’ai collectionné jusqu’à maintenant plus de 240 objets reliés à mon club préféré, les Canadiens de Montréal. D’ailleurs mes initiales G.H.G. signifient aussi Go Habs Go! Ce qui est tout un hasard! Depuis mes débuts avec le CCC j’ai révisé (toujours en équipe de deux, mais aussi en tant que mentor des nouveaux membres nommés les apprentis) plus d’une trentaine de projets médicaux de recherches sur le VIH et les Infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS).
J’aime répéter que le CCC du Réseau, un organisme fédéral qui fait partie d’un organisme encore plus grand qui est le CIHR – l’organisme Canadien des initiatives en recherches de santé – est comme une équipe de hockey : il faut travailler en équipe, et à chacun sa chaise ou son rôle parfois plus spécialisé! Comme représentant de la Société Canadienne de l’hémophilie, j’assure que les besoins des hémophiles et les personnes vivant avec des comorbidités sont considéré dans les projets de recherche du Réseau.
Le CCC existe depuis 1993. Suite aux revendications des hémophiles suite au scandale du sang, quand moi et des centaines d’autres hémophiles ont été infecté avec le VIH au cours de transfusions de sang que nous exigeons fréquemment, nous nous sommes rassemblés pour demander plus de mesures de sécurité lors de la collecte, l’utilisation et l’injection des produits sanguins, surtout les facteurs de coagulation tels que les facteurs VII et VIII.
Nous avons reçu une excuse en novembre 1997 pour les erreurs et la négligence des autorités pendant le scandale du sang contaminé au Canada. Malheureusement, il s’est produit des scandales semblables dans tous les pays développés du monde. Le fédéral a alors décidé d’octroyer un siège permanent sur le CCC à un représentant désigné et déterminé par la SCH.
Je succède à des hémophiles connus et des activistes de qualité tels que James Kreppner, John Platter et Ian De Abreu. En ce moment environ 200 hémophiles Québécois qui ont été infecté par le VIH sont toujours vivants, tout comme environ 1,200 hémophiles Canadiens. Un peu plus de 75% des hémophiles Canadiens ayant été contaminés et séroconvertis sont décédés. L’apparition de la trithérapie en octobre 1995 a beaucoup améliorer les chances de survie de tous les séropositifs à travers le monde, y compris les hémophiles, mais nous rencontrons toujours des obstacles insurmontables au niveau de notre santé.
Rien ne me prédispose à accepter un poste avec le CCC en plus de mon engagement pour la justice. J’étais avocat de formation et j’ai travaillé à la mise-sur-pied au Québec de la TPS fédérale et de la TVQ, pendant près de 26 ans. Auparavant j’avais complété mes études en droit à l’université de Sherbrooke et j’ai devenu membre du Barreau du Québec en 1988. J’ai appris le même jour avoir bien réussit tout les examens et les stages, et juste un peu plus tard que j’ai reçu du sang contaminé. J’ai vu mourir pendant près d’une décennie plusieurs centaines de frères et sœurs de sang hémophiles du sida. J’ai décidé alors de tout faire pour me battre jusqu’à la dernière seconde, autant que ma santé me permettais, en mémoire et en l’honneur de tout mes amis tombés au combat.
J’ai donné près d’une centaine d’entrevues à la télévision et à la radio en plus de mon travail habituel dans la fonction publique. J’ai écrit également de nombreux textes d’opinions pour les journaux et revues francophones et anglophones. Je suis devenu alors un activiste avec la hargne au cœur!
Aujourd’hui je coanime des cours et des ateliers depuis quatre ans à l’Université de Montréal, aux étudiant.es en médecine et du domaine de la santé (pharmacie, physiothérapie, dentisterie, ostéopathie, nutritionisme, etc.) pour leur apporter mes expériences de patient expert et d’usagé du système de santé. Je trouve surprenant que presque tous les étudiants du domaine de la santé soient actuellement nés que vers 1999 – 2000, soit bien après que le scandale du sang contaminé au Canada ne se soit produit (fin 1980 et durant les années 1990). Cela me démontre que la réalité du sida est en cours de changer, et que la prochaine génération peut apprendre des erreurs du passé pour améliorer le futur.
Ça me fait penser aussi à la devise du Québec, ‘je me souviens’. Malheureusement, il ne reste qu’environ 1 hémophile sur 4 (ou 25%) des hémophiles Canadiens contaminés, et au Québec le pourcentage est identique. Environ 78,5% des hémophiles avaient été contaminés, et souvent coinfectés (plus de 60% par le VIH et le VHC ensemble). Le taux mondial de contamination est identique. Il est incroyable que ce ne soit pas 99%, puisque les transfusions sanguines ou de facteurs de coagulations peuvent touchées tout le monde.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, depuis 34 ans je n’ai pas subi aucune infection causée par le VIH, mais j’ai souffert plutôt de problèmes liés au VHC, par exemple de flirter avec le diabète depuis deux ans. J’aimerais faire de la radio, et que mon club de hockey préféré gagne au moins de mon vivant une autre Coupe Stanley, le trophée ultime! Un vaccin définitif contre le VIH et des traitements injectables des antirétroviraux seraient aussi grandement appréciés.
Maintenant, comme survivant du scandale du sang contaminé au Canada, je porte comme combat le VIH et le vieillissement, mais aussi la co-infection, la douleur et l’inflammation chronique. Je sais très bien que mes combats ne seront jamais terminés, et que d’autres problèmes se présenteront en cours de route. Je n’abandonnerai jamais ma lutte, ni pour mes amis ni pour moi-même, pas après tout ce que j’ai vécu! Mon objectif principal est d’atteindre l’âge officiel de la retraite, 65 ans. Ensuite, je verrai.